LA ROSE-CROIX A TOULOUSE ET L'INITIATION DE H. SPENCER LEWIS

Le donjon ou tour des archives à proximité du Capitole de Toulouse, c'est cette tour que les rosicruciens nomment "Frater Donjon".

 

LA ROSE-CROIX A TOULOUSE

ET L'INITIATION DE HARVEY SPENCER LEWIS

 

par

 

Adama

 

 

L'historien Alexandre Adler dans son dernier ouvrage « les sociétés secrètes », dresse un parallèle entre l'histoire de la Rose-Croix et la région du comté de Toulouse, et bien sur le Razès. Il fait remarquer avec justesse que la généalogie de Christian Rosenkreutz est liée au sud-ouest français et occitan. Pourquoi choisir cet endroit pour transmettre une tradition nous dit Adler. Et en effet, la question est d'importance, et comme par hasard, c'est la région de l'affaire de Rennes-le-Château.

 

C'est à Toulouse que précisément, aura lieu l'étrange épisode dans la vie du grand ésotériste et chercheur de spiritualité  américain H. Spencer Lewis, qui est connu comme fondateur de l'A.M.O.R.C. en 1929 (Ancien et Mystique Ordre Rosae Crucis). L'épisode de son initiation à Toulouse a été remis en question par certains auteurs, pourtant, il existe de sérieuses présomptions, qui sont basées sur la présence dans la région de véritables dépositaires français de la tradition Rose-Croix, notamment du mystérieux groupe d'Edouard de Lapasse, fréquenté par Adrien Péladan à Toulouse. Le récit lui-même, de H. Spencer Lewis est très intéressant à étudier.

 

 Harvey Spencer Lewis

 

Ces « anciens » de la Rose-Croix présents dans cette région, ont du, forcément, être au courant de l'affaire de l'abbé Béranger Saunière. Ce sont des éléments qu'il est difficile d'appréhender, faute de document en l'état actuel des recherches, mais qui pourtant interpelle les chercheurs.

 

Nous relatons ici le récit de Harvey Spencer Lewis, il se passe en 1908, l'abbé Saunière est toujours en activité à Rennes-le-Château. H. Spencer Lewis a t-il entendu parler de l'Abbé et de son mystérieux trésor ?

 

Au cours d'un séjour à Paris, vers 1908, il fit la connaissance d'un sage qui prit son zèle en considération et qui le dirigea vers le sud-ouest de la France ; l'ultime étape fut Toulouse.

 

La scène se déroule dans une « vieille tour » toulousaine que les rosicruciens du  passé nommaient Frater Donjon.

 

« … J'avançai vers la vieille tour, le cœur un peu serré, mais non sans hardiesse. Je frappai à la porte, mais je n'obtins pas de réponse. Je vis alors, près du mur, une cordelette que je tirai. Une sonnerie retentit quelque part dans les profondeurs de cet édifice qui semblait avoir été construit il y a des centaines d'années, ce qui était d'ailleurs le cas…

 

« … Finalement, la porte, en grinçant, s'ouvrit légèrement. J'attendis. Il faisait très sombre à l'intérieur et il semblait n'y avoir aucun signe de vie en ces lieux. Je me décidai à pousser la porte et à entrer. Je me trouvai alors devant un vieil escalier, qui paraissait être bien entretenu. Je repoussai la lourde porte et j'entendis le déclic de la serrure. J'étais bel et bien enfermé dans la vieille tour et je n'éprouvai aucune crainte.

 

« Il me sembla que quelque chose, en haut, avait bougé. Le moindre bruit, dans ce bâtiment silencieux, prenait d'énormes proportions. Une grande ouverture donnait accès au premier étage, puis l'escalier devenait circulaire, chaque étage se déroulant en galerie autour de l'escalier. Les galeries étaient très sombres et pas très larges.

 

 

L'escalier de la Tour des Archives semblent correspondre au récit fait par H. Spencer Lewis aux environs de 1908.

 

« Je regardais vers le haut à travers l'ouverture et, pour manifester ma présence, je criai « Hello ! » sans savoir si cela était vraiment approprié en ces lieux. Aussitôt, venant d'un étage supérieur j'entendis distinctement : « Entrez, entrez ! » Je montai immédiatement.

 

« … j'arrivai enfin à l'étage supérieur et je vis qu'il consistait en une chambre carrée percée de plusieurs petites fenêtres. Les murs étaient tapissés de rayons remplis de livres apparemment très vieux. La pièce contenait deux tables tout à fait ordinaires et très usées, une vingtaine de vieilles chaises qui, elles, offraient beaucoup d'intérêt par un style ancien et un vieux bureau couvert de manuscrits et d'un nécessaire à sceller les documents. Sur le bureau, il y avait aussi une bougie, de la cire, des allumettes, quelques produits chimiques, une plume d'oie, de l'encre et quelques cartes astrologiques. »

 

 

« L'homme qui m'accueillit était âgé. Il portait une longue barbe grise et de longs cheveux légèrement bouclés, d'un blanc pur, lui tombaient jusqu'aux épaules. Il se tenait très droit et sa haute taille, ses épaules larges et sa distinction étaient imposantes. Ses yeux bruns surprenaient par leur éclat. Il parlait d'une voix douce et ses gestes étaient rapides. Il était vêtu d'une tunique blanche brodée de quelques symboles qui m'étaient alors inconnus, mais que n'ignorent plus ceux qui sont membres de l'ordre rosicrucien A.M.O.R.C.

 

« Je m'adressai à lui en anglais : « Je me présente à vous sans y être invité, Monsieur, et si je le fais c'est d'abord parce que je sens que cet édifice présente pour moi un grand intérêt, et ensuite, parce que vous m'avez dit d'entrer. Je suis en quête d'une information difficile à obtenir, et peut-être pourrez-vous m'aider dans ma recherche, d'autant plus que, je le vois, vous semblez vous intéresser à l'astrologie. Et je désignai de la main les cartes que se trouvaient sur le bureau.

 

« Il me répondit dans un excellent anglais, mais avec un accent français prononcé : « Vous n'êtes à aucun égard un intrus, mon ami. Vous connaissez l'astrologie et vous savez, que vous avez été « dirigé » ici. J'ai là, sur mon bureau, votre thème natal. Je vous attendais.

 

« Voici d'ailleurs une lettre préparée pour vous. Elle vous sera utile. Je connais la recherche que vous avez entreprise, et cette lettre est la réponse à votre question. Mais asseyez-vous. J'ai beaucoup de choses à vous montrer et à vous expliquer.

 

« Vous avez sérieusement cherché l'ordre de la Rose-Croix et vous aspirez à en devenir membre. Votre désir peut être réalisé, mais ensuite ? Participerez-vous au grand œuvre ? Accepterez-vous de perpétuer l'ordre dans votre pays ? Courage, bravoure et décision vous seront nécessaires. »

 

Après lui avoir dit qu'il était surveillé depuis son arrivée à Paris, et pendant tout son séjour dans le Sud-Ouest, et que les rapports le concernant étaient hautement favorables, le sage montra à Spencer Lewis des documents authentiques (d'un passionnant intérêt) sur la Rose-Croix. Puis il dit de se tenir prêt à participer à une cérémonie impressionnante qui aurait lieu prochainement. Quelques jours plus tard, une voiture vint.

 

« La voiture, reprend Spencer Lewis, franchit les deux kilomètres environ qui nous séparaient des portes de la ville, puis elle prit une route longeant les rives d'un petit cours d'eau, jusqu'à la vieille ville de Tolosa. Tolosa fut la première ville romaine de la région de Toulouse et elle est aujourd'hui en ruine. Le parcours que nous effectuions présentait beaucoup d'intérêt. Nous arrivâmes enfin à un grand domaine entouré de hauts murs et la voiture franchit le portail d'entrée. Les magnifies parterres de fleurs et les pelouses bien entretenues du domaine s'offrirent à ma vue. A gauche du domaine, un château se nichait au creux d'une colline verdoyante. Plus proche du portail, j'aperçus quelques vieilles maisons, dont l'une, carrée, était particulièrement attirante. La voiture s'arrêta près d'elle. Nous descendîmes et, à l'entrée, nous fûmes accueillis par un jeune homme vêtu d'un uniforme que l'on pouvait croire militaire. Il semblait connaître le chauffeur et le salua en lui serrant chaleureusement la main. Puis, se tournant vers moi, il me fit comprendre par gestes que je devais lui remettre une carte ou une lettre. Je lui tendis la lettre que m'avait confiée le grand secrétaire. Le jeune homme, après l'avoir lue, me salua cordialement et me fît entrer dans une grande salle d'attente.

 

« La maison était certainement très ancienne. Elle était faite entièrement de pierres, mais celles-ci étaient visiblement usées, au point qu'on pouvait se demander comment un tel édifice ne s'écroulait pas. Au bout de quelques minutes, je fus présenté à une femme âgée qui s'inclina, m'offrit sa main et m'accompagna à un étage supérieur où je fus conduit tout aussi cérémonieusement à une salle plus petite. Là, on me tendit quelques feuillets renfermant les instructions qui m'étaient destinées.

 

« Je fus ainsi informé que je rencontrerais les officiers de la Grande Loge au coucher du  soleil, c'est-à-dire trois heures plus tard, et qu'entre temps, je devrais étudier attentivement les instructions qui m'avaient été remises et me reposer. Je ne puis naturellement publier ces instructions. 

 

« … Je lus et relus les instructions reçues, puis je me détendis. Je les lus une fois de plus et je m'endormis sur le vieux divan de cette salle aux murs de pierre, dans ce mystérieux édifice qui, à cette époque, était le grand temple de l'Ordre en France.

 

« … C'est cette même nuit que je fus initié dans l'ordre de la Rose-Croix. Mon « passage  du seuil » eut lieu dans cette salle vénérable. J'y pris mes engagements solennels, je reçus la grande bénédiction et je devins un frater de l'Ordre au moment où minuit sonnait à la tour de cette demeure secrète.

 

« J'avais trouvé la Lumière. La Rose-Croix m'avait accepté et mon âme avait tressailli du souffle de l'Illumination… »

 

Amphithéâtre romain de Tolosa (Toulouse)

 

Quelques jours plus tard, à Toulouse, Spencer Lewis conclut :

 

« … j'assistai à la convocation mensuelle des illuminati dans un autre édifice ancien situé sur les rives de la Garonne. Cet édifice avait été construit à l'aide de pierres provenant de plusieurs parties d'Egypte, d'Espagne et d'Italie. Ces pierres avaient fait partie de monuments, de temples, de pyramides à présent en ruine. La pierre angulaire de l'édifice avait été apportée de Tell-el-Amarna où le grand maître de l'Ordre vécut à une certaine époque.

 

« La partie supérieure de l'édifice était utilisée à cette époque comme monastère rosicrucien. Dans la cave se trouvait une grotte rosicrucienne. Cette « grotte » était vaste, et ses murs faits de vieilles pierres grises entre lesquelles poussait la mousse et suintait l'humidité. Elle était chauffée par une grande cheminée et le seul éclairage provenait de bougies et de torches. Dans cette « grotte » se trouvait un autel d'un bois rare d'Egypte, magnifiquement sculpté…

 

« … Le jour de mon départ de Toulouse, plusieurs documents de la plus haute importance me furent remis. Ils m'investissaient de l'insigne responsabilité de perpétuer les activités de l'ordre à partir de l'Amérique. Voici les dernières instructions que me remit le très vénérable grand maître de France, M.L. … :

 

« Frater, par ces documents vous êtes nommés légat de notre Ordre dans votre pays. Vos devoirs et vos privilèges y sont parfaitement définis. Les documents que vous possédez et les quelques bijoux que je vous remets aujourd'hui vous permettront d'œuvrer au moment voulu, et de la manière indiquée. Lorsque vous aurez accompli quelques progrès, vous rencontrerez un représentant de l'Ordre en Egypte. Il vous transmettra d'autres documents et d'autres sceaux. De temps en temps, certains viendront vers vous. Vous les reconnaîtrez aux signes habituels. Ils compléteront les documents que vous aurez jusqu'à ce que vous ayez en votre possession tout ce qui est nécessaire à votre travail. Notre secrétaire vous enverra lui-même sous pli scellé, avec la protection du gouvernement français, d'autres documents, aussitôt que nous aurons été informés par nos observateurs, que vous avez accompli des progrès suffisants. Vos rapports semi-annuels nous montreront si vous êtes à même d'apporter un concours efficace à  notre Ordre. Les maîtres du monde seront heureux de pourvoir à vos besoins si cela s'avère nécessaire, et si l'œuvre de notre Ordre est fidèlement accomplie, la paix profonde sera partagée par un nombre sans cesse plus grand d'hommes de bonne volonté dans votre pays et dans le monde. »

 

Jean-Pierre Bayard dit à propos de ce texte : le récit fort beau, mystérieux, énigmatique reste dans la tradition des Noces Chymiques et l'on y trouve bien des symboles.

 

Source : La spiritualité de la Rose-Croix par Jean-Pierre Bayard. Ed . Dangles 1990 (pages 212 à 219).

 

Commentaire d'Adama,

 

Le récit fort détaillé de H. Spencer Lewis est très intéressant à plus d'un titre, et il serait une erreur de le considérer comme « pure invention ». En fait, ce récit se base sur une trame ésotérique au sens où nous le dit Jean-Pierre Bayard, c'est un récit qui décrit un processus initiatique traditionnel par « révélations » de clefs.

 

Et il est fort possible que ces événements aient au lieu, les personnages de ce récit ont existés, et sont à peine voilés. En effet, la Rose-Croix avait survécu dans la région de Toulouse, et il n'est pas impossible du tout que Lewis ait pu rencontrer ces initiés qui désiraient transmettre la connaissance de la Rose.

 

La trame de ce récit n'est pas sans rappeler celle de la mise à la lumière des plaques d'or, qui donneront le Livre de Mormon, dans la colline de Cumorah dans l'état de N.Y. (USA).  Ces récits tout comme celui de la découverte de la crypte dans la Fama Fraternitatis de 1694, semblent obéir à une structure similaire :

 

-         Crypte ou salle

-         Dépôt de connaissance enfoui donné soit par un initié, soit par une entité angélique

-         Transmission et restauration d'un état des choses perdues.

 

l'historien Christian Rebisse propose à sur le sujet des découvertes « spirituelles » la théorie de la « filiation spirituelle » dont nous livrons ici un extrait de son livre « Histoire des Rose-Croix »

 

La filiation spirituelle

     René Guénon a tenté de définir l'initiation comme étant la transmission d'une influence spirituelle dont la source est supra-humaine. (Il reste cependant imprécis au sujet de l'origine de cette dernière, qu'il situe dans des temps immémoriaux.) Il évoque deux modalités de cette transmission : l'une verticale, qui descend directement de l'invisible vers l'humanité, et l'autre horizontale, qui est la retransmission de ce dépôt sacré d'initiés en initiés. La plupart de ceux qui étudient l'histoire des Ordres initiatiques se contentent généralement d'évoquer la filiation horizontale, car il est vrai que la première reste insaisissable à l'historien. Cependant, en procédant ainsi, ils limitent souvent la question de la filiation initiatique au niveau d'une administration délivrant des certificats et des diplômes. D'autres, tels Henry Corbin, privilégient la transmission verticale et font de l'expérience mystique, de la filiation spirituelle, un critère fondamental de validité traditionnelle.

 

Fin de citation.

 

Il ne faut pas oublier que l'histoire de Rennes-le-Château semble s'axer sur le même schéma :

-         Découverte d'une crypte

-         Dépôt à la fois sacré et trésoraire

-         Transmission d'un message

 

En tout cas c'est l'aspect que nous en donne la plupart des récits « modernes » de l'affaire de Rennes-le-Château, depuis Noël Corbu, et qui bien sur, n'est pas forcément la réalité. Nous pouvons parler avec une extrême prudence d'une « légende urbaine » qui se crée dans cette littérature, mais il est vrai également, que l'idée de la crypte n'est pas si stupide qu'il n'y parait. Nous savons de nos jours, qu'il existe bien une crypte sous l'Eglise Sainte Marie-Madeleine, et que cette crypte était connue de l'Abbé Bérenger Saunière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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29/09/2007
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